17967ème jour
Où je retrouve la voiture volée
Je suis retourné chez
Hertz pour clore le contrat, mais à ma grande surprise, la voiture avait été retrouvée, elle était bien en fourrière, malgré les informations demandées et redemandées à la police. En revanche, la fourrière était fermée pour le week-end, ce qui compliquait la sortie de la voiture et la récupération de mes lunettes.
J’ai laissé tomber ce casse-tête et je suis parti à Niteroi en bateau. Niteroi est une ville dortoir assez laide ne présentant guère d’intérêt. En revanche, la traversée, sur un vieux bateau bleu et blanc, vaut le détour tant pour les vues sur Rio que par le mélange des passagers. Une fois de l’autre côté, j’ai juste testé deux nouveaux mélanges de fruits et j’ai pris le bateau de retour.
17966ème jour
Plus de voiture
Le matin, en attendant Bruce, avec qui j’avais rendez-vous, j’ai décidé d’aller à Niteroi, la ville de l’autre côté de la baie, d’où la vue, parait-il, est belle. On peut se rendre à Niteroi, soit pas l’immense pont à péage qui enjambe la baie, soit en bateau. Je préférais le bateau, mais comme j’avais envie de voir les plages de l’autre côté qui ont des noms merveilleux, j’ai choisi d’y aller en voiture, puis de faire l’aller retour en bateau, et de revenir en voiture après avoir visité les plages.
Je me suis donc rendu à Ipanema, mais la voiture n’était plus là. J’ai bien cherché en tout sens, j’ai du me rendre à l’évidence, elle avait disparu. Je me suis renseigné auprès du concierge d’un hôtel qui m’a indiqué que, faute d’avoir payé les deux Reals par jour, elle avait sans doute été mise en fourrière. Je me suis donc rendu en bus chez
Hertz, à l’autre bout de Copacabana, où j’ai expliqué la situation. Après avoir appelé la police, il s’est avéré que la voiture n’était pas en fourrière et avait donc été volée. Je me demandais bien qui pouvait avoir volé une vieille Chevrolet noire. J’ai donc du repartir à
Leblon, tout au bout d’Ipanema à la police touristique, là où j’avais fait la déclaration de vol de mes papiers deux ans plus tôt. La fille qui a pris ma déclaration était incroyablement sexy avec un beau sourire et une jolie paire de seins moulés dans un tee shirt orange, elle prenait des cours de français à l’
Alliance française. Ce qui me gênait le plus dans cette histoire était de perdre mes nouvelles lunettes de vue et de devoir faire la route de São Paulo à Rio sans elles.
Le soir j’ai retrouvé Bruce et ses grands yeux verts. A mon grand amusement, il a choisi que nous nous retrouverions à
Cafeine, et on y a bu deux grand
milkshakes au café. Lui comme moi on avait envie de se retrouver à mon hôtel, mais en y arrivant, à ma grande surprise, Bruce s’est fait interdire l’accès car il n’avait pas sa carte d’identité. Je lai donc raccompagné jusqu’à chez lui dans l’avenue qui longe la plage derrière le
Copacabana Palace, on a bu un dernier cocktail de fruits et je suis rentré à mon hôtel en taxi jaune.
17965ème jour
Un jour classsique à Rio
Le matin on se lèvera tôt, à la fois pour rester plus près de l’heure française, mais aussi parce que la lumière est belle au petit matin. On délaissera le banal petit déjeuner de l’hôtel et on se rendra à Ipanema,
Rua Farme de Amoedo où se trouve
Cafeine, une cantine idéale pour le matin. On y prendra le breakfast
simples qui comme son nom l’indique est tout simple, mais délicieux, avec un vrai expresso brésilien, un jus d’orange pressé et un pain baguette tout chaud avec du beurre et un peu de confiture d’un fruit inconnu. Puis, on marchera, car on marche beaucoup à Rio, avec le dilemme quotidien : Ipanema ou Copacabana ? Ipanema se trouve à 555 pas de ma chambre (de la moquette au sable) tandis que Copacabana se situe à 680 pas (mesurés dans les mêmes conditions). C’est un critère de choix possible.
On marche beaucoup mais on boit aussi beaucoup à Rio. On s’arrêtera de temps à autres à l’une des petites cahutes multicolores qui se trouvent en bord de plage. Ma préférée est la N°35 car elle bénéficie d’un wifi gratuit qui vient d’on ne sait où. Et bien sûr, on boira le jus d’une noix de coco toute fraîche pour deux ou trois Reals. On pourra aussi tester l’un des innombrables bars ouverts sur la rue qui propose des
Sucos et mieux encore des mélanges. Il y a les classiques (orange, ananas, kiwi, pomme banane, raisin…) et il y a un nombre incalculable de fruits exotiques. On essayera des mélanges étranges (melon pomme, pas mal du tout) où des choses plus étranges (fraise banane) et on recommencera, car à Rio, on a très soif.
On ne déjeunera pas, car à Rio on n’a pas très faim. En revanche on dînera tôt, vers cinq heures, quand il n’y a pas trop de monde à la
Garota d’Ipanema. Sur l’addition, il pourra être inscrit :
FECHAMENTO DA MESA
MESA : 31 25/02/02 17 :17
Jacqueline
NAO TEM VALOR FISCAL
2 Caipirinha R$ 16,00
1 Salada de Palmito R$ 25,00
1 Bolinhos de Bacalhau R$ 25,00
1 Agua Mineral c/Gas R$ 2,70
Sub-Total…… : R$ 68,70
Comme souvent, le garçon aura ajouté à la main 10% pour le service.
On repartira en choisissant le chemin de la plage, les pieds dans l’eau, et en mettant son tee-shirt autour du cou pour protéger ses épaules un peu brûlées des rayons du soleil venant de Leblon.
17964ème jour
Ouro Preto - Mariana - Rio
Avant de partir vers Rio, je suis parti dans la direction opposée, afin de visiter brièvement Mariana, l’autre ville baroque de la région. Le site où elle est bâtie, une simple pente à flanc de montagne est beaucoup moins impressionnant que celui d’Ouro Preto, mais les maisons coloniales colorées et surtout les églises y sont absolument éblouissantes. La cathédrale, qui donne l’impression de n’avoir point changé en trois siècles contient l’orgue le plus ancien de toute l’Amérique latine et chaque dimanche, un concert y est donné. Je suis reparti en direction du sud, sur cette belle BR040 qui va jusqu’à Rio. En quatre cent kilomètres, on passe de mille mètres d’altitude au niveau de la mer. La végétation est belle, très vallonnée, et en cette saison, il y a de nombreux arbres immenses aux fleurs rouges, jaunes ou violettes. Un peu avant Rio, on croise Pétropolis où je m’étais rendu voici quelques années.
En vrai
Carioca, je n’ai plus besoin de carte pour me repérer dans Rio. Je reconnais l’
avenida do Brasil, l’étrange château XIXème que l’on aperçoit entre les ponts 6 et 7, puis les horribles voies surélevées qui passent au dessus de
Centro,
Gloria, le lac de
Botafago derrière lequel se dresse la silhouette familière du
Pao de Azucar, le tunnel qui relie
Botafago et
Copacabana, l’avenue
Princesa Isabel. Puis c’est la longue avenue devant la mer. Au fond je tourne à droite dans la
Rua Reinha Elisabeth je passe devant mon hôtel et je trouve une place sur l’avenue qui longe la plage d’Ipanema.
17963ème jour
Ouro Preto
C’est une ville étonnante, blottie dans des montagnes à l’accès difficile. Ville de chercheurs d’or, elle a longtemps été la capitale du Minais Gerais, avant d’être abandonnée en même temps que les mines fermaient, au profit de Belo Horizonte. C’est ce qui l’a sauvée. Et aujourd’hui, se tient fièrement debout un incroyable patrimoine architectural, dans des rues à pic, avec un grand nombre d’églises latino baroques qui se découpent sur la belle silhouette de la ville. Je loge dans une pension elle-même construite dans une belle ancienne maison coloniale.
Mais bien sûr, c’est le carnaval ici aussi et la ville devient impraticable dès la fin de l’après-midi, et ce jusqu’à l’aube. Le carnaval d’Ouro Preto a la réputation d’être celui des jeunes et des étudiants et en effet la foule qui se presse dans les vieilles rues en pente est jeune et bigarrée. Alors je me couche tôt, j’essaye de dormir dans le vacarme de
samba qui vient d’un peu partout et le matin, alors que la ville est fraîche et silencieuse, alors que les équipes de nettoyage passent pour nettoyer les déchets dans une odeur de graisse, d’urine et de vomi, je visite les si belles rues en oubliant mon odorat. Lorsque je passe dans des endroits un peu reculés, qui sans doute étaient sombres la nuit, le sol est jonché de bouteilles d’alcool, de canettes de bière et de préservatifs usagés, signe que la réputation des brésiliens n’est pas usurpée.
17962ème jour
São Paulo - Ouro Preto
Comme à l’habitude j’ai eu du mal à sortir de São Paulo. Dans les méandres des échangeurs et des autoroutes, la moindre erreur coûte cher en temps et j’en ai commis trois. La première sur la
via Dutra, j’ai raté l’embranchement de Belo Horizonte. J’ai parcouru une bonne vingtaine de kilomètres vers le nord, à la recherche d’un moyen de rebrousser chemin. J’ai pris une sortie un peu au hasard, j’ai erré dans des quartiers étranges, j’ai vu notamment un village où l’on ne voyait que des stations de lavages de camions. J’ai enfin retrouvé
Dutra en direction du sud et là deuxième erreur, je me trouvais sur les voies centrales lorsque j’ai retrouvé la sortie Belo Horizonte et là encore, impossible de sortir. J’ai du aller retrouver l’affreuse
Diagonale Tiété, une autoroute qui longe de part et d’autres un fleuve du même nom et qui ressemble plus à un égout entouré de béton. J’ai réussi à trouver un pont à enjamber le
Tiété, à repartir à nouveau dans l’autre sens, et là, nouvelle erreur, impossible de reprendre
Dutra.
Je me suis enfin récupéré mais j’ai mis plus d’une heure à quitter Sao Paulo. Ma patience a été récompensée car les six-cent kilomètres qui séparent Sao Paulo d’Ouro Preto sont un enchantement, une succession de montagnes, de très belles vues sur une végétation tropicale, de cette terre rouge qui est si particulière. Comme à ma mauvaise habitude, j’ai voyagé sans carte, m’aidant parfois de
Google Map. Dans les nombreuses zones de non couverture, je me suis fié à mon instinct, et j’ai été très inquiet lorsque la route s’est transformée pendant ving kilomètres en une piste de terre rouge. Mais parti à 6h00 de mon hôtel, je suis arrivé à 14h00 très précises à Ouro Preto.
17961ème jour
São Paulo
Journée calme passée pour l’essentiel près de la piscine à lire
On va où papa ? de Jean-Louis Fournier. Le soir je suis allé à
Garulhos récupérer la voiture qui m’accompagnera pendant cette semaine, je l’ai garé devant l’hôtel et j’ai dîné d’une
capirinha beaucoup trop forte et de petits
pan de queijo. Je suis resté à l’heure française afin de me lever tôt et de profiter du jour.
17960ème jour
Mes petites habitudes paulistiennes
Je ne sais pourquoi j’aime cette ville et c’est une idée étrange que d’y passer le week-end du carnaval, alors que tous les habitants sont partis à la plage. J’ai eu plaisir à retrouver mon quartier de
Jardins, la
rua Augusta et
Haddock Lobo, et j’ai dîné comme à l’habitude au
Figueira. Saison oblige, il n’y avait hélas pas de
baby oysters de
Santa Catarina, mais le
baby beef lui était parfait, tendre et savoureux.
17959ème jour
Le Brésil au bout de la passerelle
Le décalage horaire entre la France et le Brésil est étrange : trois heures l’été et cinq heures l’hiver, ce qui correspond à la différence naturelle des fuseaux horaires. La compréhension du phénomène nécessite une petite gymnastique intellectuelle, mais au final, on y arrive assez bien. En ce moment, les deux pays ne basculant pas le même jour, la différence est de quatre heures. Comme à l’habitude, le vol part de Roissy parmi les derniers, de façon à ne pas arriver trop tôt à São Paulo.
17958ème jour
Le jour d'avant
J’ai hésité à retourner à la
Neuvième d’Eschenbach, mais finalement, je me suis dit que les maniérismes du premier mouvement m’agaceraient plus qu’autre chose et je suis rentré chez moi préparer mon bagage pour le lendemain.
17957ème jour
La Neuvième de Christophe Eschenbach à Pleyel
Etrange
Neuvième que celle dirigée ce soir par Christoph Eschenbach à la tête de son orchestre de Paris. Un premier mouvement d’une lenteur insupportable, presque toujours à la limite de la brisure, ce qui peut parfois passer avec un orchestre d’exception, mais échoue un peu lamentablement ce soir. Deux mouvements centraux plutôt bien interprétés mais manquant vraiment de clarté et un dernier mouvement assez réussi, très lent à l’image du premier, Eschenbach arrivant fort bien à maintenir la tension extrême de ce monde qui bascule dans la mort. Exceptionnellement, le public de Pleyel a réussi à rester silencieux pendant une petite minute de superbe silence à l’issue du concert ;
A côté de moi, se tenait un jeune homme aux cheveux mi-longs et au parfum discret et intrigant. De temps à autres, nos avant bras se touchaient sur toute leur longueur sur l’accoudoir. Cela me déconcentrait terriblement. A la fin du concert, il est parti sans un regard.
17956ème jour
Déménagement(s)
Une fois de plus, je me retrouve dans les cartons. Pas chez moi, mais au bureau. Comme toujours, je range mes affaires dans trois cartons et je jette le superflu. C’est mon dix-septième bureau depuis que je travaille et ma neuvième adresse professionnelle. Comme d’habitude je retrouve des objets inattendus du passé, comme ce briquet marqué
I love LULU, souvenir d’une soirée de décembre 1999 dont j’avais ramené une incroyable quantité de ballons multicolores gonflés à l’hélium que je n’avais réussi à faire entrer dans la voiture qu’en laissant toutes les fenêtres ouvertes. Mes filles émerveillées et incrédules les avaient découverts à leur éveil et elles évoquent encore ce souvenir de temps à autre.
17955ème jour
Un souvenir du métro de Moscou
Lors de l’un de mes séjours à Moscou, je crois l’été dernier, j’avais pris le métro avec deux collègues. Il est toujours difficile de trouver des places assises libres aux heures de pointes, mais cette fois ci, il y avait bien de la place pour quatre personnes et je me suis rapidement assis sur la banquette. Aussitôt une odeur insoutenable m’a envahi les narines et je me suis aperçu que mon voisin était un clochard endormi au pantalon entièrement recouvert d’urine. Je me suis remis debout dans la foule, près de mes collègues hilares et nous avons repris notre activité habituelle : observer les visages et les tenues incroyables qui composent la foule des passagers.
17954ème jour
Banalité
Week end de repos à ne pas faire grand-chose, ce à quoi je devrais plus souvent m’astreindre. J’ai de nouveau échangé chez
Gibert et à la
Chaumière à Musique quelques centimètres de disques contre les coffrets équivalents, de façon à réduire un peu mes mètres d’étagères. J’ai testé un restaurant italien de la rue Guizarde que l’on m’avait recommandé et que j’ai trouvé bien médiocre. J’ai vu le film
Espions qui se laisse regarder laisser un grand souvenir.
Bref un week end fort banal.
17953ème jour
The Arc
Je m’étais toujours demandé comment Philippe Petit, le funambule qui avait rejoint les deux tours du World Trade Center, avait réussi à tendre le câble entre les deux tours. Ne trouvant pas de solution convaincante, j avais imaginé deux immenses files pendant de chacune des tours jusqu’au sol, et attachés entre eux par un complice au sol. Peu discret, mais envisageable. La vérité est toute autre. Le câble a tendu en jetant un film au dessus du vide à l’aide d’un arc. C’est ce que j’ai appris en regardant ce fort intéressant documentaire que l’on peut voir sur
Daily Motion.
17952ème jour
Un dernier dîner
Est-ce parce que nous sommes un vendredi 13, ce dîner avec SH chez
Barlotti est plutôt raté, les pâtes au foie gras sont médiocres. J’invite SH à partir au Brésil avec moi mais il chipote, mentionne un anniversaire pour ne venir que quelques jours. Je sors un peu déçu et très agacé.
17951ème jour
Le concert de l’orchestre du Gewandhaus et de Riccardo Chailly à Pleyel
Je suis parti à 7h10 du bureau et malgré cela, je suis arrivé en retard salle Pleyel. Arriver en retard à un concert est l’une des choses qui m’énerve le plus dans la vie mais je parviens presque à rester calme d’autant plus que le concert démarre avec une obscure ouverture de Mendelssohn (l’ouverture « pour trompettes » (qui est pourtant sans tambour ni trompette)) et je constate dans la salle des retardataires, où deux écrans de télévision permettent de suivre le concert que je n’ai pas raté grand-chose. Il y a une quinzaine de personnes avec moi et, Dieu sait pourquoi Laurent Bayle. Je profite de l’installation du piano pour prendre ma vraie place et non pas une de celles disponibles sous le balcon à l’infâme acoustique. Le concert se poursuit avec le concerto pour piano de Mendelssohn, œuvre réputée ennuyeuse mais dont Lang Lang, très inspiré, réussit à faire quelque chose d’intéressant. Après l’entracte, très belle symphonie Ecossaise avec hélas, un dernier thème conduit au pas de course par Riccardo Chailly alors qu’une belle ampleur solennelle l’aurait transfiguré en un final sublime. En bis, le mouvement lent de la
Cinquième symphonie et, pourquoi pas, la
Marche Nuptiale, dont je n’avais jamais noté le lien rythmique avec le début de la
Cinquième de Mahler.
17950ème jour
Déjà...
Ma chérie, ce petit cadeau en souvenir de tous les moments merveilleux que nous avons vécus ensemble pendant ces dix-huit années. Et pour tous les instants de bonheur que nous vivrons encore ensemble.
Ton Papa qui t’aimera toujours,
Vincent
La Luna, le 11 février 2009.
17949ème jour
Le second concert du LSO à Pleyel avec John Eliot Gardiner
On prend les mêmes et on recommence. Cette fois-ci la
Quatrième Symphonie que j’entends du balcon et la
Septième que j’entends du premier rang, juste derrière les souliers vernis de Sir John Eliot. Mes voisins du bas, deux jeunes hommes, dissertent sur l’emplacement de l’alliance des musiciens, affirmant que les protestants la portent à droite et les catholiques à gauche. Un débat s’instaure avec le rang de derrière sans qu’aucune conclusion définitive ne soit apportée.
L’orchestre, organisé de droite à gauche, violons, violoncelles, altos, seconds violons avec les contrebasses tout au fond, derrière les vents, sonne toujours aussi sec, et toujours avec quelques instants de bonheur absolu.
17948ème jour
Le Concert du LSO à Pleyel avec Maria João Pires et John Eliot Gardiner
Un peu sans le vouloir, j’avais pris trois concerts en trois jours à Pleyel, deux concerts du London Symphony Orchestra et l’un de l’orchestre du
Gewandhaus. Ce soir donc Beethoven. L’ouverture du
Roi Etienne pour se mettre en bouche, puis le
Troisième Concerto avec Maria João Pires. J’ai des souvenirs d’adolescence avec cette exceptionnelle interprète de Mozart. A l’âge où mes amis écoutaient Pink Floyd, je m’étais acheté le gros coffret ERATO de sa première intégrale des sonates pour piano de Mozart. Sur la couverture, son visage de garçon manqué aux cheveux très courts. Et c’est l’impression qu’elle donnait sur scène ce soir, alors qu’elle a repris sa coupe de cheveux si courte et qu’elle est apparue sur scène si petite à côté de l’immense Sir John Eliot. Le résultat m’a un peu déçu. Rien à dire côté piano, mais il n’était presque pas possible de reconnaitre le merveilleux London Symphony Orchestra qui jouait sans vibrato avec une sécheresse assez pénible. Maria João Pirès nous a offert en bis une très belle
Mazurka de Chopin. Après l’entracte, Gardiner a tenu à expliquer dans un français parfait les liens entre la musique de Beethoven et la révolution française. Le résultat était proche de celui du concerto, énergique mais très sec, plein d’inutiles maniérismes avec des moments hallucinants de beauté. On ne peut quand même pas empêcher l’un des meilleurs orchestres du monde à jouer bien.
Le matin, une société de transport m’appelle pour me demander où ma valise enfin retrouvée doit être livrée. Je ne saurai jamais où elle s’est promenée sans moi pendant ces huit jours.
17947ème jour
Slumdog
Le film serait plutôt réussi si
le livre n’existait pas. Le plus gros reproche à faire est définitivement le montage, dans une sorte de clip haletant, mais dans l’ordre chronologique de l’histoire, alors que le livre, en allant sans cesse en avant et en arrière, laisse beaucoup mieux savourer les surprises de la vie.
En anglais le livre :
Q&A. Sobre et concis
En français le livre :
Les Fabuleuses Aventures d'un Indien malchanceux qui devint milliardaire . Long mais amusant
En français comme en anglais le film :
Slumdog. racoleur.
Et toujours pas de nouvelles de ma valise...
17946ème jour
Benjamin Button
Vu avec mes filles le film de David Fincher "
L’étrange histoire de Benjamin Button" avec Brad Pitt et Cate Blanchett. Il est étrange qu’un film aussi long puisse avoir pour origine une simple nouvelle de Scott Fitzgerald, "
The curious case of Benjamin Button". Le film a beau durer trois heures, son intérêt ne faiblit jamais et il m’a donné très envie de relire Fitzgerald.
Et toujours pas de nouvelles de ma valise...
17945ème jour
Valise Prévert
J’ai souvent repensé à la liste à la Prévert qui se trouvait dans ma valise et que je ne reverrai sans doute jamais :
- Un costume
Paul Smith bleu à fines rayures rouges acheté à Paris,
- Trois chemises de marques diverses,
- Une cravate
Gucci offerte par Stefano,
- Un jean C17 avec une jolie ceinture
Pepe Jean blanche achetée avec mes filles à Lille,
- Un autre jean
Armani et une ceinture, blanche elle aussi, achetée à Bali,
- Un pull de coton noir
Armani au col fermant avec de gros boutons acheté à Amsterdam avec Marek II.,
- Un polo
Ralph Lauren acheté en solde il y a peu à Roissy,
- Des boxers achetés un peu partout,
- Des chaussettes noires achetées à Stockholm,
- Une paire de
Converse noires achetées à Los Angeles avec mes filles,
- La trousse de toilette FCUK que m’avait offerte Manu, et tout son contenu…
Mais ce que je regrette le plus, c’est mon tee shirt noir avec marqué
Ipanema en lettres blanches avec la même police que
Coca Cola. Je l’ai beaucoup mis et son remplacement est vraiment difficile. J’envisage aussitôt quelques vacances à Rio pour le remplacer.
Et d'ailleurs, toujours pas de nouvelles de ma valise...
17944ème jour
Mehmet
J’avais travaillé avec lui pendant plusieurs mois il y a trois ans. On avait sympathisé, on avait dîné à plusieurs reprises ensemble à Istanbul, notre relation, était allé au-delà du travail, sans pour autant être de proches amis. Et au cours d’un dîner avec un client ce soir, j’ai appris sa fin tragique. La mort de sa femme par un cancer foudroyant, l’an passé. La partie de pique-nique qui tourne mal en octobre dernier, les eaux qui montent et qui les emportent, lui et ses trois enfants. Et je pense à cet aîné, cet adolescent que je ne connais pas, qui faisait ses études à Londres et a ainsi échappé au drame et qui se retrouve seul dans la vie.
Et toujours pas de nouvelles de ma valise, ce que je relativise largement ce soir là.
17943ème jour
Ma dernière neige de la saison
Alors qu’il neige à Moscou, je reprends le métro, puis le
Sheremetyevo Express au rouge étincelant. A l’aéroport, je me rends directement au bureau des objets trouvés où je tombe cette fois-ci sur une adorable babouchka qui me retient une bonne demie-heure, afin de faire une liste exhaustive du contenu de ma valise. De temps en temps, je lui écris sur un papier des mots
ARMANI,
IPANEMA, pour qu’elle les retranscrive sur son clavier. Je ne suis pas avare en
Spassiba et je prends le vol
Turkish Airlines du soir pour Istanbul.
Et donc toujours pas de nouvelles de ma valise...
17942ème jour
Un concert anniversaire
Je me rends pour la première fois dans la salle de concert Tchaikovsky qui se situe à
Maiakovskaia et qu’il ne faut pas confondre avec le conservatoire Tchaikovsky, nettement plus réputé. C’est une assez grande salle blanche toute en amphithéâtre, construite dans les années 20 et à l’acoustique un peu froide. Un orchestre moscovite y fête ce soir ses 65 ans par un concert uniquement composé d’œuvres courtes et assez facile. On entendra –entre autres- l’orchestration de Berlioz de l’
Invitation à la valse, des danses hongroises de Brahms, les
Zigeunerweisen de Sarasate et l’ouverture de
Guillaume Tell… Comme à l’habitude en Russie, une présentatrice endimanchée et très fière de son rôle, vient introduite chaque œuvre et ses interprètes et est très applaudie par les spectateurs enthousiastes. L’orchestre est moyen. Devant moi, une petite femme en rouge accompagnée de son mari et qui dirige fébrilement tout le concert de sa place. Par moment, quand la musique se perd en roucoulades slaves, elle fond en larmes et son mari la console. L’orchestre joue deux fois en bis, une sorte de marche militaire totalement inconnue en Europe occidentale mais qui met l’assistance quasiment en transes.
Et toujours pas de nouvelles de ma valise...
17941ème jour
Sheremetyevo
Le vol du soir pour Moscou. Je sors de l’avion à Sheremetyevo dans le milieu du groupe des passagers et je me débrouille très mal à la douane et j’arrive parmi les tous derniers passagers à la remise des bagages. Je me rends compte assez rapidement que le mien n’y est pas et qu’il n’y sera pas, et j’ai en même temps un très mauvais pressentiment. Il est minuit trente, je me rends au comptoir
Aeroflot des bagages perdus et une mégère stalinienne me fait remplir en trois exemplaires le même très long formulaire. Il est bien sûr inutile de râler. Je dois ensuite me rendre avec l’un des trois exemplaires pour le faire tamponner par le service de dédouanement, puis revenir voir la mégère pour récupérer mon passeport. Je sors enfin de l’aéroport, mon fidèle taxi moscovite est là fidèle au poste, le trafic est évidemment fluide à cette heure et j’arrive au Novotel de
Novoslobodskaya vers deux heures du matin. Je demande une brosse à dents et un nécessaire de rasage de remplacement. Je me prépare aussi à acheter des vêtements de remplacement dans la mesure où mon périple se poursuit par Istanbul jusqu’au vendredi.
17940ème jour
Do Farai, mon amour I
Avant l’opéra, SH et moi avons déjeuné à mon cher
Do Farai. C’était aussi délicieux que dans mon souvenir. Le serveur a préparé le dessert maison, une sorte de crème à base de lait, d’œuf en neige et de vodka. Afin de le rendre plus mousseux, il est monté sur une chaise et a vidé son mélange de très haut dans un récipient posé à même le sol. Comme il n’a pas renversé une goutte, il a reçu une vraie ovation de tout le restaurant.
Après l’opéra, nous avons rejoins un groupe près du marché au poisson dans un bar de plein air. On y a bu un apéritif local, le
Spritz composé de
Prosecco, d’eau de Selz et de Campari.
Après cela, SH et moi sommes encore retournés chez
Do Farai. C’était encore plus merveilleux que le déjeuner.
Et ce matin, nous nous sommes levés au milieu de la nuit pour prendre le premier vol vers Paris.