Les variations Goldberg de Yuncham Lim à Abu Dhabi
Après l'installation Internet et la livraison d'une table, me voila parti pour Abu Dhabi, sur une autoroute désormais familière. Bizarrement,
Google Maps et
Waze positionnent le
Red Theater en deux endroits différents, je tatonne un peu mais finalement découvre que le théâtre se trouve au sein d'un campus universitaire. Comme je n'ai pas eu le temps de déjeuner, je prends un
early lunch à la cafetaria de l'université; c'est très propre, bien organisé, plutôt bon et très amusant.
A vingt heures la salle est comble pour accueillir le jeune artiste qui a gagné le concours Van Cliburn en 2022 à l'âge de 18 ans. Le concert démarre par une pièce de Hanurij Lee, un jeune compositeur ami de Lim,
...round and velvety-smooth blend..." le temps de quelques applaudissements et c'est le début d'un extraordinaire voyage au sein des trente variations dont c'est une banalité de dire combien elles sont difficiles à interpréter depuis qu'un certain Glenn Gould se les est appropriées, il y a quarante cinq ans. Et ce soir, j'ai eu l'impression d'une redécouverte complète de l'œuvre, tant Yuncham Lim prend plaisir à réinventer chaque variation, s'octroyant une liberté totale, libéré par une facilité technique absolument phénoménale. Ce jeune pianiste, que j'avais entendu l'an passé à la Philharmonie avec Klaus Mäkelä dans un
Deuxième Concerto de Rachmaninov qui ne m'avait pas passionné est un génie absolu.
Le seul problème du concert de ce soir était l'assistance, une moitié coréenne et très concentrée, et l'autre moitié, arabe qui visiblement se demandait ce qu'elle faisait là tant elle semblait s'ennuyer: de nombreux retardataires qui ne faisaient rien pour être discrets, des pauses pipi innombrables dont certains ne revenaient pas, des téléphones cellulaires allumés. Heureusement, rien ne semblait déconcentrer le jeune coréen qui est venu au des trente variations avec deux pauses improvisées heureusement non ponctuées d'applaudissements comme on aurait pu l'imaginer. En bis un extrait magistral des
Années de Pélerinage, le
Sonnet de Pétrarque CIV.
Je suis rentré à Dubai tout patraque tellement le concert m'a choqué par sa beauté. J'ai pris un dernier verre au
S-Bar avec mon collègue français et je suis rentré chez moi. J'ai failli me coucher mais non il ne faut pas: j'ai un vol à trois heures du matin.