Quand j'étais chanteur
J’ai mis longtemps a rappeler Montand. Peut être deux mois. J’avais tort. Il avait vraiment fait ce qu’il avait dit : il m’a ouvert les portes de son éditeur Polygram. Et il faut reconnaître que la carte de visite Montand était diablement efficace puisqu’au bout d’un an de travail, d’essais, de rencontres diverses, j’ai commis un CD 2 titres (et non pas un 45 tours comme l’avait joliment dit Montand). Celui-ci n’est certes pas resté dans de nombreuses mémoires, mais le titre principal commençait à bien marcher en 1985/86.
Ca s’appelait "
Toute la Nuit", c’était assez sage, et plutôt destiné à un public sage, bien en phase avec mon look de l’époque. Je faisais mon boulot alimentaire en parallèle, mais j’ai du l’arrêter à la sortie du CD, au moment où il a été le plus diffusé à la radio et lors de quelques passages à la télévision dont le plus mémorable fut
Champs Elysées spécial Montand où j’ai chanté le titre en play back devant la France entière et devant mon sponsor attendri.
Derrière tout est allé vite pendant quelques mois. Je n’ai fait que ça. Des radios, des télés, des interviews, pas de concerts, vu l’étroitesse de mon répertoire. Etroitesse que je tentais de combler en travaillant avec acharnement sur le CD complet, qui lui, n’est jamais sorti.
Pendant toute cette année j’ai connu les affres et les plaisirs de cette demie-célébrité. Je me souviens du plaisir intense procuré par ma première demande d’autographe. Je ne me suis pas du tout méfié au départ et je n’avais même pas demandé à France Telecom à être en liste rouge. J’ai donc commencé à recevoir des masses d’appels, souvent charmants, parfois agressifs, toujours lassants au bout d’un certain temps. Et puis surtout il y a eu les groupies. Un noyau dur de six ou sept filles et garçons qui se sont mis à camper en bas de chez moi, rue des Quatre-Vents, quasiment jour et nuit. J’ai fait l’erreur de proposer à certains de monter de temps en temps, ce qui a terriblement amplifié le phénomène et j’avais du mal à rentrer chez moi certains soirs.
J’ai du déménager chez un ami qui habitait presque en face de chez moi. J’avais là un point d’observation sur les groupies campeurs. Je devais seulement faire attention à entrer et sortir très discrètement du quartier.
De temps en temps, j’observais le groupe avec une paire de jumelles et je demandais à mon ami-voisin d’aller proposer à la proie sélectionnée une nuit dans un hôtel.
C’est là que tout à mal tourné. Mes conquêtes avaient entre quatorze et quinze ans, et tout ceci s’est fini en prison. Mais je vous raconterai ça dans 366 jours.
Si vous êtes sages.