Mes voyages a Rome
La première fois, j'avais quinze ans. C'était un voyage organisé par l'école. Ma mère, qui n'était jamais allée de sa vie plus au sud que Vérone, avait estimé qu'il était impossible d'aller à Rome en mai sans un chapeau et j'avais arboré une casquette américaine bleue avec le drapeau étoilé sur le côté. En ces temps reculés, mes camarades de classe trouvaient ça bizarre. Je me souviens de mon excitation à regarder la Méditerranée depuis le train au petit matin, je me souviens d'avoir été fasciné par la Trinité des Monts la nuit, je me souviens d'avoir dormi douze heures tant j'étais excité et fatigué au retour.
La seconde fois était un vrai bonheur: c'était mon premier vrai voyage dans ma première voiture, une petite Renault 5 dorée. C'était aussi mon premier voyage en amoureux avec V. Je me souviens qu'elle me suçait alors que je conduisais sur l'autoroute du Sud et que quelques chauffeurs routiers s'en apercevaient et nous faisaient des appels de phare. C'est au cours de ce voyage que j'ai découvert Portofino, Lucca, Sienne, Chianciano Terme, les asperges vertes, Florence, les spaghetti
alle vongole, le
tartuffo, et que je suis devenu amoureux à jamais de l'Italie. A Rome, nous habitions dans un petit hôtel en réfection, près du Colisée et tous les jours, il y avait des changements dans notre chambre. Je me souviens aussi que c'est la seule fois où l'on pouvait conduire librement partout dans le centre historique. J'adorais foncer au hasard dans les petites rues pavées, le long des palais sombres jusqu'à en perdre le sens de l'orientation.
Le troisième voyage était un combiné Rome, côte amalfitaine, Naples. Je revenais d'une convention de mon boulot de Sardaigne et j'avais attrapé un vol Cagliari Rome d'al Italia à l'issue d'une histoire à mourir de rire qu'il faudra que je raconte un jour ici.
Le quatrième séjour avait un but particulier : j'étais le témoin de mes amis E & S qui se mariaient à la Trinité des Monts. Je me souviens de la belle promenade de l'Aventin jusqu'au Pincio, je me souviens de la longue discussion que j'avais eue avec le père de S. près du Circo Massimo, je me souviens des invités du Mariage qui avaient chanté ensemble le premier air de Leporello à l'Osteria del Orso, je me souviens du Requiem de Mozart à Sant Ignazio, je me souviens d'avoir filé à Venise après le mariage pour faire découvrir cette ville à V.
Au cours du cinquième voyage à Rome nous avions rejoint Gaëtan qui logeait dans un grand centre derrière le Vatican. Je me souviens de notre balade sur la via Appia et d'avoir découvert la magnifique petite église San Clemente.
Le sixième séjour me rappellera toute ma vie deux petits impermeables roses et le fait d'avoir cherché, tard dans la nuit les paroles
d'En sortant de l'Ecole, et une partie de tennis surréaliste sur le court municipal de Ravello.
Le septième voyage est plus flou dans mon esprit. Il était destiné à faire plaisir à D. pour qu'elle découvre la ville. Je me souviens surtout de notre rendez-vous foireux à Santa Maria Maggiore et de l'avoir retrouvée endormie dans le hall de notre hôtel. Je me souviens des obsèques de Diana à la télévision et de la mort de Solti.
Le huitième séjour était avec P. J'ai aimé lui faire découvrir cette ville où je sais qu'il ne pourra jamais plus séjourner sans songer à nous.
Le neuvième séjour vient de s'achever.