La mer morte et un vendredi à Jérusalem
Pour aller de Tibériade à Jérusalem, j’avais imaginé devoir faire le tour de la Cisjordanie en repassant par l’ouest. La fille de l’hôtel m’a expliqué qu’on pouvait parfaitement longer le Jourdain, et traverser la Cisjordanie du nord au sud. Je longe donc la rive sud du lac, je traverse le Jourdain vers l’est, je le longe sur quelques kilomètres et je le retraverse une dernière fois vers l’ouest, juste avant qu’il ne devienne la frontière avec la Jordanie. Il y a un check point lorsque l’on rentre en Cisjordanie, mais aucun contrôle pour entrer, juste pour sortir, et encore cela semble bien léger.
Les paysages sont beaucoup plus pauvres, et surtout beaucoup plus sales, il y a des détritus abandonnés un peu partout. Il y a aussi de nombreuses cultures, plus en tout cas que sur la rive jordanienne. Après une quarantaine de minutes, j’arrive à proximité du pont
Allenby (
King Hussein bridge pour les jordaniens). Un peu plus au sud, en face de Jéricho, c’est l’endroit où le Christ aurait été baptisé par Saint Jean Baptiste. En fait, on n’en sait rien. On a retrouvé des gradins très anciens qui probablement descendaient vers le fleuve et qui se trouvent maintenant une dizaine de mètres plus haut que le lit du fleuve. Des autocars de pèlerins arrivent, enfilent une chasuble blanche vendue sur place et font trempette dans une eau maronnasse en chantant des cantiques. Je me suis abstenu.
J’ai poursuivi vers le sud jusqu’à la Mer Morte dont la couleur bleue m’a surpris. Il y a quelques stations que l’on pourrait éventuellement qualifier de balnéaires. C’est moche et un peu sale. Le niveau de la mer morte baissant d’un mètre par an, il faut descendre une butte en sable gris et on se trouve au bord de l’eau. Il y a quelques chaises en plastique, une table bancale où je pose mes vêtements. L’eau est chaude, elle semble en effet plus épaisse qu’à l’habitude et sans pouvoir tenir assis, on flotte en effet remarquablement bien. C’est finalement de peu d’intérêt mais il faut l’avoir fait une fois dans sa vie. Il faut aussi prendre une douche après si l’on ne veut pas passer la journée à se gratter.
J’ai repris la route de Jérusalem où je suis arrivé en début d’après midi. Je n’ai même pas du montrer mon passeport pour quitter les territoires occupés.
Je vais à pied de mon hôtel à la vieille ville et je constate qu’il est impossible d’entrer dans la vieille ville car des milliers d’arabes sortent par la porte d’Hérode et il semble difficile d’aller contre le courant. J’essaye à la porte suivante, la porte de Damas, mais là encore, une foule compacte tente de sortir. J’ai attendu un moment puis, la frustration l’emportant, je suis rentré en me serrant contre la muraille. C’était une erreur. A l’intérieur de la ville un véritable entonnoir s’était créé et il était impossible de lutter contre ces milliers d’épaules serrées les unes contre les autres. Des boutiquiers aspergeaient la foule d’eau tant le risque d’un évanouissement était fort.
Après une demi-heure de lutte, j’ai réussi à trouver un cul de sac où l’on pouvait un peu respirer et je suis resté là à regarder passer la foule. J’ai discuté avec un palestinien qui m’a expliqué que c’était la prière du dernier vendredi du ramadan et qu’il y avait peut être 500.000 musulmans dans la vieille ville, venus de Jérusalem-Est mais aussi de tous les territoires occupés. Il était lui même d’Hébron. La situation étant relativement calme, le gouvernement israélien donne plus de laisser passer pour le vendredi, même s’il existe un âge minimum (quarante ou cinquante ans) pour pouvoir venir sur les lieux saints.
J’étais heureux de retrouver la vieille ville dans laquelle je me suis longuement promené.
A partir de 18h00, la ville a complètement changé d’aspect et elle a soudain été envahie de juifs orthodoxes, en redingote noire, chapeau noir ou schtreimel et qui déambulaient partout pour célébrer le début du sabbat. J’ai lu sur
Google News que le matin même, trois jeunes palestiniens s’étaient fait lyncher par un groupe de jeunes israéliens, juste parce qu’ils se trouvaient à Jérusalem-Ouest. Etrange ville.
Le soir, je suis allé dîner au 41 de
Jaffa street où se trouve une petite cour entre les immeubles avec de nombreux restaurants. Je suis allé chez
Barood, où j’ai mangé une délicieuse
ceviche (le plat semble terriblement à la mode en Israël) et un plat palestinien. C’était merveilleux, même si un énorme cafard s’approchait un peu trop près de mon pied. De retour à l’hôtel c’est le sabbat et je commets la bêtise de prendre le
shabbat lift.