Egmont et le Requiem de Mozart par Claudio Abbado à Lucerne
Le matin, me voila donc parti pour Zurich par un petit avion
Air France. Par hasard, je suis dans le même avion que deux amis que j’avais convaincu de venir pour entendre la
Huitième de Mahler. Le programme a changé comme chacun sait, mais ils ne m’en veulent pas. Arrivé à Zurich, je prends le train incroyablement silencieux pour Lucerne. Le temps de déposer ma valise à l’hôtel et de faire un tour en ville et je retrouve au
Seebar du KKL le
Wanderer lui-même, celui dont je lis les pérégrinations musicales depuis des années. Le personnage est étonnant et il a assisté à tout ce qui vaut la peine d’être entendu en Europe depuis une trentaine d’années. Il a assisté à la première du Requiem il y a deux jours et, pour meubler le trou de son agenda, il a fait un aller retour à Salzbourg pour le Tamerlano de Minkowski avec Domingo. J’apprends grâce à lui que Claudio Abbado a renoncé à la
Huitième parce qu’en fait il ne l’aime pas vraiment et qu’il a pris sa décision en mai, alors qu’il travaillait la partition en Italie et après avoir écouté son enregistrement berlinois et qu’il ait trouvé mauvais. La
Huitième ne sera donc sans doute jamais jouée à Lucerne dans le cadre du cycle qui sera donc inachevé.
Le programme de substitution démarre donc avec la musique de scène d’
Egmont dont on ne joue en général que la très belle ouverture que l’on juxtapose avec le
Finale, en formant ainsi un ensemble étonnamment cohérent. Dès les premières notes j’ai un bonheur fou à réentendre l’orchestre du Festival et son son magnifique, qui n’a vraiment rien de comparable avec celui de l’orchestre Mozart entendu récemment à Pleyel dans cette même ouverture. Et pourtant le niveau, même s’il reste exceptionnel, me semble un petit peu en deça de celui des années passées. Certains piliers de l’orchestre sont partis, les membres de l’orchestre Philharmonique de Berlin qui venaient ont reçu l’interdiction formelle de participer à l’orchestre et quelques membres de l’orchestre Mozart, au son un peu acide, ont fait leur arrivée.
La partie vraiment intéressante du concert est bien sûr le
Requiem, magnifiquement interprété, Abbado ayant choisi de donner la primeur au chœur, l’orchestre restant le plus souvent dans un rôle d’accompagnateur de luxe. Les soixante choristes sont issus du chœur de la Radio suédoise (entendu dans le
Crépuscule des Dieux d’Aix) et ceux de la Radio bavaroise (entendus dans
la Huitième l’an passé). Non seulement ces chœurs sont superbes, mais on comprend quasiment chaque syllabe de ce qu’ils chantent. Magnifique basse de René Pape. Comme a l’accoutumée, le public reste magnifiquement muet à la fin du concert dans un silence encore plus religieux qu’à l’habitude.
Ah! Et j’ai oublié de signaler que dans l’après-midi, Michael, qui habite Bangkok, a repris contact avec moi. Discussion un peu surréaliste où il assure que je ressemble au rôle principal de
The Newsroom, une série dont je n’ai jamais entendu parler.