Un concert rue de Madrid
Je suis allé hier au Conservatoire qui se trouve a deux numéros de chez moi, dans ma rue pour un concert d'orchestre donné par les étudiants. Au menu l'ouverture de la
Force du destin et la
Symphonie du Nouveau Monde.
Nous sommes assis au deuxième rang juste derrière le chef.
J'aime beaucoup les orchestres de jeunes. La mise en place est évidemment moins bonne, un mois de répétition ayant du mal à compenser un siècle de musique partagée au sein des grands orchestres. Mais quelques maladresses et quelques couacs sont largement compensés par une envie de bien faire, une énergie, un engagement étonnants.
En plus ils sont beaux à regarder et rien n'est plus sensuel de mon point de vue qu'un instrumentiste au physique avantageux en pleine action. Je me souviens qu'il y a quelques années avec P., nous avions fait notre palmarès de beauté avec le programme du concert du
Gustav Mahler Jugend Orchester où tous les musiciens étaient photographiés individuellement.
Hier, il y avait notamment deux violonistes du deuxième rang, blonds comme les blés, portant les mêmes lunettes. On aurait dit deux frères. Une violoncelliste est en nage tellement elle est concentrée dans l'action. Elle est belle dans l'effort. Et puis je suis fasciné par la première contrebasse : des yeux expressifs, un beau visage rond, les cheveux tirés en arrière pour constituer une queue de cheval qui descend à ses reins. Il a un jeu de regard intense avec le chef. Lors du final du deuxième mouvement de la symphonie, il a un rôle important et son regard fixé vers le chef exprime une concentration totale. On dirait presque qu'ils font l'amour ensemble tant la relation est intense.
Fin du concert. Le public, largement composé d'amis, fait une ovation. Les musiciens sourient et cherchent dans le public des visages connus. Sur le trottoir devant le conservatoire, ils sont dèjà là, en civil, leur instrument à l'épaule.
Un vrai moment de musique simple et partagée loin de la frime de Pleyel ou du Théâtre des Champs Elysées.
J'aime vraiment ta façon de parler de musique, "loin de la frime de Pleyel ou du Théâtre des Champs Elysées."
un mois de répétition ayant du mal à compenser un siècle de musique partagée au sein des grands orchestres.: quelle est belle cette phrase, et quelle est ramassée. En toute logique, elle ne veut rien dire, personne ne partage un siècle de musique. Et pourtant, elle a un sens, évident, que tout le monde comprend. Elle sous-entend que la musique transpire des murs, des lieux, des fantômes des musiciens précédents, et qu'on en sort pas indemne.
Alice -
email| 23.02.05 @ 23:56 >