Gran Partita
C'était au Théâtre Marigny il y a fort longtemps. J'habitais Paris depuis peu et pour rien au monde je n'aurais manqué cette pièce. Un américain du foyer d'étudiants où je logeais y jouait le rôle muet d'un serviteur. Mais surtout il s'agissait d'
Amadeus de Peter Shaffer, mis en scène par Polanski, avec le même Polanski dans le rôle de Mozart et François Périer dans celui de Salieri.
Et au début de la pièce, il y a cette scène où Salieri rencontre pour la première fois Mozart qui dirige quelques musiciens dans une sérénade pour vents devant l'archevêque de Salzbourg. Salieri se remémore la scène et raconte le début de l'adagio :
"
Sur le papier ça n'avait l'air de rien. Le début est simple, presque comique, une pulsation bassons-cors de basset -un bandonéon qui miaule- et ensuite, soudain, haut perché, un hautbois et sa note qui flotte, comme suspendue, jusqu'à ce qu'une clarinette vienne la reprendre et l'adoucir en une phrase de pur délice. Ah, ça n'était certes pas un singe savant qui avait pu composer cela, c'était une musique exceptionnelle, empreinte d'une telle tension, d'un tel inépuisable désir. Il me semblait entendre la voix de Dieu."
C'était la première fois que j'entendais un extrait de la Sérénade
Gran Partita de Mozart et j'étais abasourdi, ébloui. Je me suis bien sûr précipité sur les enregistrements disponibles sans jamais en trouver un totalement satisfaisant. Fürtwangler l'a pourtant enregistrée en 1947 à Vienne avec quelques
Philharmoniker. On trouve des enregistrements par les ensembles à vent des plus grands orchestres mondiaux. Je n'avais jamais trouvé celui qui me plaisait vraiment. Dans le Tamagochi, j'avais choisi tristement celle de Marriner avec des membres de l'Academy of Saint Martin in the Fields et c'est l'une des oeuvres que je préfère entendre en avion.
Et puis samedi à Amsterdam, un peu par hasard, j'ai acheté cette nouvelle version par le
Nederlands Blazer Ensemble. Je pouvais à peine y croire en l'écoutant en voiture. C'est la perfection du début à la fin, une imagination débordante, des risques parfois inouïs, un son gourmand, le
Ländler presque valsé dans le Menuet, la cinquième des variations de l'andante avec sa basse de clarinettes et de cors de basset qui ondule comme une vague sans fin... J'ai déjà du écouter cette version une bonne douzaine de fois, je l'écoute en ce moment même, et je me régale à l'idée de pouvoir l'entendre trois fois en allant à Londres en Eurostar demain matin.
Wolfgang Amadeus Mozart
Sérénade N°10 en si bémol majeur K. 361 pour deux hautbois, deux clarinettes, deux cors de basset, deux bassons, quatre cors et contrebasse
Nederlands Blazer Ensemble
NBELIVE 017
Dress-Code très strict, je crois, pour entrer au Blazer Ensemble...
(ok, je sors)
baba-yaga | 23.06.07 @ 01:17 >